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Le Tracteur
21 avril 2010

Critique de Bruno Ruiz Mars 2010

LÉOTARD/BEAUREDON, FRÈRES ÉPERDUS DE VIE
Jean-Pierre Beauredon, c’est un peu quelqu’un qui aurait bu un
verre de moins pour ne pas empêcher tout à fait le sublime partage du
néant. Un trop plein de larmes qui ne peuvent plus couler. Cela fait
longtemps déjà qu’il s’écorche aux textes de quelques désespérés
flamboyants. Hier Bukowski, aujourd’hui Léotard. Il se dessine à leurs
ratures. Se soigne à leurs brûlures. Avec nous, il longe un mur
infranchissable, comme un chien qui voudrait s’enfuir d’un chenil.
Tout est là et il n’y a rien à comprendre. Simplement survivre.
Dans son théâtre, tout se confond. Tout est confondant. La
fausseté de la mise en abyme n’est là que pour préparer la véritable
mise en abîme. Dans le brouhaha hésitant des lumières, deux
musiciens d’exception accompagnent sa voix détruite : Claude Delrieu
à l’accordéon/percu, Joël Trolonge à la contrebasse. Ils ne vont nulle
part. Ils répètent. Ils poussent le chant, le chahutent, l’épousent, le
prolongent. Et le poème de Léotard nous violente pour écrire une
nouvelle tendresse. Sans véritable adresse sinon à celle de cette vieille
femme cassée, extravagante, un peu lunaire, un peu vulgaire, qui
traverse parfois le plateau pour nous faire sentir qu’elle a la légèreté
de l’enfance et l’expérience de l’attente. On ne bascule jamais. On est
dans la chute. De la table d’alcool à la table d’harmonie. D’ailleurs,
depuis le début, on descendait chercher dans un accordéon désossé le
fond de l’inaudible, la dernière mélodie dérisoire qui sauve. Tout cela
est intense et définitif. Salubre comme les derniers mots d’un ange.
Jean-Pierre Beauredon ne chante pas faux. Il chante exactement.
Bruno Ruiz

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